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& puis, à Marseille :
Pour tout savoir sur le CHUM, c’est là
— Un PPPQ (petit plaisir partagé quotidien) de Corinne, avec qui nous faisons cet “exercice” depuis plus d’un an, que je voulais mettre sur le blog depuis longtemps, oublié sur le bureau de l’ordi :
Il s’agit du livre de Joseph Ponthus, A la ligne
Je l’ai cherché dans ma bibli pour un atelier justement, mais il doit être à Tulle…
Une petite présentation pour vous donner envie de le lire, & regarder et écouter d’autres interview de ce gars formidable, qui dit en écho à Macron et Hollande : “aujourd’hui c’est plus officiellement des prolétaires, c’est des illettrés et des sans-dents..!”
— Hier soir, au téléphone, Manée toute bouleversée me raconte son tracas de la journée : les élagueurs, là pour couper les sapins, en ont profité (?) pour couper 4 chênes américains (plantés par son père) qu’ils ne devaient pas couper…
Cela m’a mis sur la piste de l’atelier d’aujourd’hui..!
Atelier 7 – mardi 28 oct.19
Un immense écrivain,
Louis-Ferdinand Céline – Entretiens avec le professeur Y. (1955 – Gallimard)
Il y a des situations énervantes, des gens qui vous chauffent, des moments où la colère remonte en vous comme une vague de fond, une lutte contre des préjudices, jusqu’à la tristesse ou l’écœurement.
D-écrivez 2 situations de ce genre, que vous avez vécu enfant-ado, et récemment.
Pensez à votre style d’écriture, ces 2 pages de Céline ne sont pas là pour rien !
Ecrivez au présent, essayer d’être au plus près du flux de pensée qui vous assaille, videz littérairement votre sac.
Pensez à la longueur et au rythme des phrases, aux allitérations, au vocabulaire, à la conjugaison et à la ponctuation, comment rendre compte stylistiquement de votre état mental.
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Ce soir, To Yee se charge des enregistrements, avec le portable d’Agnès (dont je reconnais la gomme…!)
& une nouvelle recrue à l’atelier, Marie-Laure.
(& je n’ai toujours pas fait la connaissance d’Annie “en vrai” !)
1- texte de « jeunesse »
2 – texte « adulte »
Lecture : montez sur votre grand cheval, prenez votre épée pour tracer oralement ce Z qui veut dire Zorro, levez-vous pour lire svp .. !!!
3 – Extrait de Phèdre les oiseaux de Frédéric Boyer (POL)
A partir du texte 2 lu par un(e) collègue, qui vous aura marqué, faites un dialogue de tragédie à votre façon
Ouvrez la petite veste rouge de votre cœur, votre cœur inutile cheval pour la victoire qui ne vient pas…
Pensez au style et vocabulaire de la tragédie !
Avec un dessin de To Yee, pour finir cet atelier en beauté, et merci bien !!
Ces jours-ci, travail et repos, avec le ciel sur la tête..!
— Toujours les affiches pour La fille de Rappaccini, avec Pascale Lefebvre venue à l’atelier pour faire les couleurs des 2 affiches imprimées samedi, avec une bouteille de jus de raisin (j’avais dit que le jaja pour le pique nique quand on a plein de boulot, c’est pas l’idéal…!) à l’étiquette formidable!
L’expérience Rappaccini… :
passer du temps à mettre toutes les lettres à la même hauteur, et s’y reprendre à plusieurs fois quand ce n’est pas possible d’imprimer en un seul passage…
— Ça me fait penser à ce livre, après un message de Federico :
Alors je suis en train de le lire (j’ai pas fini), mais pour l’instant ce que je préfère, c’est cette “blague de typographe”en exergue, qui en fait est juste une histoire d’écriture..!!
et qui me renvoie en écho à un vieux boulot fait avec des tampons (où il n’y a pas de ponctuations) sur des étiquettes, et donc de cette phrase (reprise imprimé dans un livre d’artiste ensuite), qui me fait toujours jubiler (c’est plus gai que la blague de typographe, ce serait une blague de tamponneuse!) :
Il va falloir qu’on fasse un atelier d’écriture sur la ponctuation..!!
— Puis colmater la fuite d’après déluge qui menaçait sérieusement la prise électrique…
De bas en haut, pour que ça se passe bien de haut en bas..!
Rouvrir pour réadapter le système D anti-fuite…
La leçon à en tirer : écouter ses intuitions (lors des travaux anciens) plutôt que l’avis de personnes connaissant moins bien “le terrain”..!
PPPQ 381 / lundi 28
— bureau et bricolage devant la mer, se creuser la tête pour trouver une façon simple de rebouchage esthétique du système anti-fuite, être bien contente du résultat en fin de journée, le vice caché personnifié, feng shui réussi !
C’est plus facile que les travaux SNCF suite aux intempéries, et pas de train sur la ligne Marseille-Toulouse pour aller à Tulle tout bientôt…
— Pendant ce temps-là, c’était le “grand banquet” de Saint-Pardoux pour le finissage d’automne de l’exposition de Zoé Chantre et de Jean-Pierre Larroche, Mystères et curiosités de Saint-Pardoux
& du Mons !
— Pendant ce temps-là toujours, et depuis, pas de nouvelles de Pec à propos de la Touble night du samedi soir de Ô les chœurs…
Sauf Gaëlle qui a été déposer des flyers pour la rencontre du jeudi 28 novembre avec Olivier Steiner...
Avec entre autre la participation de Jean-Louis Costes, découvert pour ma part à la Maison Rouge…
(Passez l’intro de 10 mn du commissaire d’expo, trop proliférique, comme il dit…)
— En attendant ce dimanche, se faire quelques heures de vacances pour garder la niaque, et puis, parce que sinon, c’est du gâchis de ne pas profiter de ce don du ciel (et de l’eau à 19-20°) quand il est bien luné!
et une photo du dimanche soir prise en passant au retour de la plage avec Thomas, avant que la nuit tombe trop tôt
— Participer avec le Lieu/Lien au Printemps des poètes 2020, sur le thème du courage !
“Édition 2020, Le Courage (texte de présentation de Sophie Nauleau)
C’est un vers de Corneille. Un vieil alexandrin célèbre, à la toute fin du Cid, qui dit le cœur, l’espoir et le triomphe du temps quelque part à Séville :
Espère en ton courage, espère en ma promesse…
Et dans cet hémistiche toute la bravoure du monde roule à l’assaut des siècles, avec tant de constance. Tant de patience passée à la postérité, comme un secret légué, mantra plus efficient que les rudes lois du sang.
Et la vaillance d’outrepasser les règnes, les solitudes, les exils, les douleurs, les aurores et les disparitions. Nos horloges sonnent l’heure du courage, écrivait Anna Akhmatova à l’hiver 1942. Tandis que Prévert tordait le cou aux pensées toutes faites dans ses « Adonides » : La guerre déclarée / j’ai pris mon courage / à deux mains / et je l’ai étranglé. Car le mot, trop taillé pour la gloire, a parfois mauvaise presse. Pourtant le cran. Pourtant l’audace. Pourtant la virtus latine, qui fait dire à Virgile et Apollon d’une même voix : Déploie ton jeune courage, enfant, c’est ainsi que l’on s’élève jusqu’aux astres.
Cette force d’âme capable de tutoyer les étoiles en appelle aux mots de Desnos, dont Éluard affirmait, devant ses cendres revenues de Terezín, qu’il était la poésie du courage. Une poésie qui se joue la vie, l’amour, la liberté jusque dans la pire des morts. Avec ce qui me reste de courage, défoncer toute la Nuit, proposait Paul Valet, tout aussi prompt à mourir.
C’est coton, le courage, même sans être corps et âme en lambeaux.
La course plus que la rage. La lumière à foudroyer le noir. Comme s’il n’y avait qu’un poète pour dire cet éclat d’être sans orgueil. Cette témérité de la langue qui vous mène plus loin que la vue ne peut voir. Cette intrépidité de la parole qui nous fait défaut. Cette endurance à Raturer outre. Ce souci du poème. Je vais droit au jour turbulent, annonçait André du Bouchet. Que l’on se nomme Blaise Cendrars ou Benjamin Fondane, Charlotte Delbo ou Sylvie Brès, Juan Gelman ou Ludovic Janvier… Tous ont osé. Et la frappe, la vitalité de l’écriture, le prodige de l’énergie poétique de nous révéler encore et toujours.
Post-scriptum : ce n’est pas un hasard si l’anniversaire des 100 ans de Boris Vian, le 10 mars 2020, tombe en ouverture de cette édition dédiée au Courage. Car celui qui ne voulait pas crever Sans qu’on ait inventé / Les roses éternelles / La journée de deux heures / La mer à la montagne / La montagne à la mer / La fin de la douleur, celui qui savait que La vie, c’est comme une dent / D’abord on y a pas pensé / On s’est contenté de mâcher / Et puis ça se gâte soudain / Ça vous fait mal, et on y tient / Et on la soigne et les soucis / Et pour qu’on soit vraiment guéri / Il faut vous l’arracher, la vie. Celui-là qui écrivait comme quatre, chantait du soir au matin et jouait comme personne, l’enfant de Ville-d’Avray, le joyeux condamné de la Cité Véron, ce singulier et magnifique poète de 39 ans savait ce qu’il en était de vivre.”
un petit dossier à concocter, mais les idées ne manquent pas, pour le courage, la poésie et le monde…
Et puis, nous avons le “visuel” tout prêt…
— C’est un peu moins la course, j’ai été beaucoup occupée par la maquette de ma contribution à “12 millions de romans possibles…”, où j’ai mis à profit pas mal d’heures de voyage en trains-par-jours-de-grève…
— Avant ça, des photos du rdv pique-nique au forum de L’Empreinte, le 17 octobre :
— Et puis le soir à la médiathèque pour la projection de Toto et ses sœurs
(Aysé avant son “discours” sur la pauvreté qui touche de plus en plus les enfants)
— Pendant ce temps-là, des nouvelles de Venise où était Manée avec l’ENSA, pour la biennale :
?
— Ça ferait des belles cartes postales, la nouvelle vitrine du Lieu/lien! (exit Chirac!)
Avec des extraits de textes de l’atelier d’écriture, pour donner envie à de futur participant.e.s ?
Ça a marché, puisque Annie est venue après avoir vu l’annonce sur la vitrine!
et que mes espions sur place m’ont envoyé une photo de jeunes lectrices by night…
— & puis, 1er RDV à L’Empreinte avec Bruno Geslin, après une 1ère séance de travail de 3 jours pour préparer le futur spectacle.
Assister à ce rendu du travail comme une petite souris ! Générosité de nous faire participer à cette création à un stade très “fragile”…
Cela nous a donné envie, après avoir vu Chroma l’année dernière, d’organiser au moins une projection d’un film de Derek Jarman, qui a aussi fait une adaptation d’Edouard II
— Puis bref passage à Paris entre Tulle et Marseille, l’occasion de lire chez Corinne un Fabcaro..!
de manger des mochis glacés, pour m’encourager à finaliser cette maquette de 15 jours d’observations à Franprix cet été…
et d’aller voir une expo à la Halle saint Pierre, + café, après une visite à la librairie L’Attrape-Cœurs, qui va s’agrandir, chic!
C’est pas l’ambiance de la biennale..!
— Back home, avant que le ciel ne nous tombe sur la tête;
toujours la maquette qui prend des plombes, pendant que Manée s’active aux fourneaux de l’automne!
Là un nouveau livre commandé à la librairie Préférences; Ici, des “nouvelles feuilles” au rosier…
Là et Ici, le déluge, heureusement ignoré à l’atelier l’Encre Rouge, pour imprimer des phrases de La fille de Rappaccini…
Affiche imprimée en 2 fois (pas assez de lettres dans la casse pour l’imprimer en une fois!), ce qui fait que la 2ème partie nous enchante sur du papier fluo ! Elle sera bien au Lieu/lien!!
Atelier 6 – mardi 22 oct.19
lumière d’éclair
1- Ce matin, je voulais me lever tôt pour préparer l’atelier d’écriture.
J’ai été réveillée par l’orage, juste sur la mer, devant la maison, éclairs, tonnerre et déluge.
Puis il y avait un scorpion dans l’évier. Pourtant le signe du scorpion ne débute que demain. Que faire ?
Alors faites un texte qui explique la situation et les diverses solutions que vous proposez :
Annie (chic, une nouvelle participante!) :
Leslie (chic, encore au Mons!) :
David :
Raphaëlle :
Manée :
Dominique :
2- Nâzım Hikmet – La plus étrange des créatures
Comme le scorpion, mon frère, Tu es comme le scorpion
Dans une nuit d’épouvante.
Comme le moineau, mon frère,
Tu es comme le moineau,
Dans ses menues inquiétudes.
Comme la moule, mon frère,
Tu es comme la moule
Enfermée et tranquille.
Tu es terrifiant, mon frère,
Comme la bouche d’un volcan éteint.
Et tu n’es pas un, hélas,
Tu n’es pas cinq,
Tu es des millions.
Tu es comme le mouton, mon frère,
Quand le bourreau habillé de ta peau
Quand l’équarisseur lève son bâton
Tu te hâtes de rentrer dans le troupeau
Et tu vas à l’abattoir en courant, presque fier.
Tu es la plus étrange des créatures, en somme,
Plus drôle que le poisson
Qui vit dans la mer sans savoir la mer.
Et s’il y a tant de misère sur terre
C’est grâce à toi, mon frère,
Si nous sommes affamés, épuisés,
Si nous sommes écorchés jusqu’au sang,
Pressés comme la grappe pour donner notre vin,
Irai-je jusqu’à dire que c’est de ta faute, non,
Mais tu y es pour beaucoup, mon frère.
Faites un texte (inspiré par la forme du poème de Nâzım Hikmet) à partir des éléments proposés dans l’exercice 1 :
Annie :
Dominique :
Leslie :
David :
Raphaëlle :
& un beau texte sérieux de Manée :
3 – A l’arrêt de bus, qui tarde à venir, une grand-mère qui rentre du marché avec son Caddie demande à 2 jeunes hommes de l’aider à le monter chez elle. Elle habite à côté. Ils prennent le Caddie et rentrent ensemble dans l’immeuble.
Une dame qui a envie de bavarder me fait remarquer :
— Elle n’a pas peur ! Elle a confiance ! C’est pas prudent ! Après faudra pas qu’elle dise…
— Heureusement que ça existe encore la confiance ! De toute façon, elle a besoin d’aide. Vous auriez pu aussi lui proposer de l’aider !
— Il fait pas froid, hein !
Plus tard, elle me tape sur le bras pour m’apostropher :
— C’est quoi, ÇA ??
Je lève la tête, j’étais en train d’envoyer un SMS, je me dis qu’il y a un insecte sur mon imper (c’est l’effet scorpion…)? Où, quoi ?
— Là, ÇA !!
De dos, une femme ou un homme en nuisette courte parme et violette à fines bretelles, le haut du dos un peu vouté, les belles jambes nues et les mollets musclés qui marche à grandes enjambées avec de hauts escarpins en peau violets, un petit sac de courses en plastique à la main.
— Ça, c’est juste une femme ou un homme qui marche dans la rue.. !
— Il ou elle n’a pas froid ! (sous entendu aux yeux ou aux fesses ?)
— — — — — — — — — —
A partir de cette scène, faites un dialogue.
Pour la lecture, chacun lira une phrase à la suite les uns des autres, pour faire un « dialogue géant » autour de la table.
(Raphaëlle lit pour Annie qui a du partir, puis pour elle)
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Merci, vous m’avez bien fait rire quand je vous ai écouté à l’atelier, après avoir imprimé (sur du fluo pour le plaisir et sur papier blanc pour l’expo!) une affiche pour la future exposition début décembre chez Altiplano des monotypes de Pascale Lefebvre inspirés de La fille de Rappaccini (de Nathaniel Hawthorne), pour Laterna magica (Fotokino)
Atelier 5 – mardi 15 oct.19
Aujourd’hui après la pluie nous sommes 6 + 1 participante éclair, Manée est absente à cause (!) de la biennale de Venise, ce qui rend jalouse Raphaëlle (et moi, mais je pense à Venise avec des bottes…!)
Avec un texte d’Olivier Leroi 123 conseils aux extraterrestres (éditions Adélie)
Que les dents soient plus dures que la croûte de pain.
Surtout ne pas attendre que les feuilles tombent pour se cacher dans les arbres.
Quand la viande tombée croque, penser à balayer sous peu.
Plus la population mondiale augmente plus la masturbation en voiture est dangereuse.
Dans l’attente de la princesse, se raser de près et se passer une onction douce sur le visage. Surtout ne rien dire.
Ne pas oublier de faire revenir le maquereau à la cocotte.
Ne pas attendre la nuit pour cueillir des tomates mûres.
Ne pas oublier de bien s’essuyer les pieds et de se sentir chez soi.
Se dire que c’est quand on a les pieds dedans qu’on se demande d’où vient l’odeur.
Ne pas tenir compte des samedis et des dimanches, penser juste au temps qui passe.
Bien s’assurer qu’il ne reste plus de branches dans les poches.
Faire en sorte que la disponibilité des uns rencontre l’adaptabilité des autres.
Surtout ne jamais se retourner quand on quitte la table du restaurant. Penser juste au vide qu’on laisse.
Ne jamais attendre la promise. Faire comme si elle était morte. Rester léger quoi !
Ne s’attendre à rien même si une envie de champignons cuits effleure l’esprit.
Ne pas mettre de la terre dans les plats, la mort arrive trop vite.
Vivre le temps comme il vient, ne pas oublier tout de même de manger des légumes.
Bien se souvenir que la peur n’est que complaisance.
S’appliquer vraiment à ne pas passer à côté de sa vie.
Penser plus souvent à ne pas penser.
Surtout ne pas se laisser aller à des angoisses d’amateur.
Se souvenir que l’amour n’est qu’une conséquence de l’ennui.
Ne pas hésiter à sentir que la nuit tape plus fort.
Se concentrer sur une branche de pommier (en fleur) en écoutant de la musique.
N’oublions pas que si les femmes font l’amour avec le cow-boy c’est parce qu’elles pensent au cheval.
Si on trouve des graines sur le chemin, ne pas hésiter à les planter sur le bord.
Quand la superbe est partout, méfions-nous du coucou.
Attendre même longtemps le réveil de la beauté.
N’oublions jamais qu’il y a des milliers de maisons au bout de milliers de chemin.
Ne pas hésiter à penser que croire aux apparitions c’est vivre dans le présent absolu.
Ne plus penser que les autres ne sont que des couleurs et de la chaleur.
Bien se souvenir de la première scène de ménage.
Notons qu’il est bien difficile d’habiter dans une tarte maison.
Observons que la longueur de la route est indépendante du choix du véhicule.
Bien tâter les chairs pour s’assurer que l’amour est dedans.
Bien s’assurer qu’avant l’amour il ne reste pas un cheveu long qui coupe.
Ne mettre que des pulls marines pour monter sur des zèbres.
Faire en sorte que l’exigence ne freine pas l’expérience.
N’oublions pas qu’avoir un idéal, c’est fuir le présent.
Ne pas faire exprès des taches juste pour essayer la lessive.
Si l’on saute du coq à l’âne, s’assurer que ce n’est pas juste pour une question d’orifice.
Bien regarder les poils qui poussent entre les cuisses et de demander vraiment d’où l’on vient.
Laisser toujours pousser un peu d’herbe dans le jardin pour ne pas déflorer la nudité de la terre.
Ne pas subir forcément la prison pour traquer la fraîcheur.
Penser que c’est la nature qui fait de l’acupuncture quand on se pique aux ronces.
Ne pas penser que le miroir est déformant quand on ne supporte pas les autres.
Penser à enfoncer les doigts dans tout pour percer les secrets et détruire les illusions.
Ne pas confondre la muse éthérée et la musette accordéonnée.
Ne pas oublier que la lumière du jour n’est qu’une forme de repérage pour éviter de se cogner aux arbres lors des promenades nocturnes.
Ne pas écrire juste pour draguer, penser au fond.
Que le corps ne serve pas juste à supporter la tête.
Ne pas s’étonner d’avoir des aphtes si on confond l’éponge à toilettes et l’éponge à vaisselle.
Ne pas hésiter à ne pas douter de la qualité de ses émotions.
Quand on klaxonne les corbeaux et les buses sur les piquets de clôture, ne pas s’attendre systématiquement à ce qu’ils s’envolent.
Quand on respire profondément l’odeur des ses flatulences, être conscient de son narcissisme.
Peindre à l’eau de Cologne en pensant aux aveugles.
Bien se caler dans son fauteuil et faire la liste de tous les objets de la maison.
Se méfier des conseils des dépressifs.
Ne pas se sentir concerné par la détresse combinée des femmes.
Que les rondeurs se louent pour 1 heure.
Qu’après le mou arrive le dur.
(si vous voulez en savoir plus sur le travail d’Olivier Leroi, vous pouvez aller là, car l’artothèque a plusieurs de ses œuvres)
1 — Dressez une liste personnelle de conseils pour des extra-terrestres.
Appuyez vous sur votre expérience et observations. (Il doit y avoir un sens aux propositions, même s’il est parfois partiellement caché.)
Les gauchères sans se concerter se sont mises du même côté de la table
Leslie
Dominique
David
Raphaëlle
Sylviane
Jeanne
Johanna
(qui est arrivée exceptionnellement après et partie avant, alors j’ai recopié son texte, après avoir admiré son savoir écrire vertical de gauchère:)
— Toujours commencer la journée par donner des miettes aux oiseaux.
— Sentir l’onde lumineuse et croquer ce début de journée à plusieurs dents.
— Faire la vague avec le monde extérieur et se laisser inspirer.
— S’encombrer de peaux encombrantes, éviter le masque.
— dresser le couvert de la gourmandise… attendre les lève-tard puis savourer son café.
— Entendre une musique passer et suivre l’harmonie de loin.
— Participer à la danse du monde. Ne pas savoir à quoi ça sert mais en chercher le sens.
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2 — Parmi les lectures, notez 4 propositions qui vous intéresseraient si vous débarquiez sur terre.
En choisissant 1 des vôtres en plus des 4 conseils retenus, sur une grande feuille, dessinez-tracez-écrivez une carte avec des mots pour relier ces 5 propositions.
Leslie :
Jeanne :
Dominique :
Sylviane :
David :
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Ou passez à l’extrait (au début) des Mémoires d’un tricheur de Sacha Guitry (1935, Gallimard) :
“Du jour au lendemain, un plat de champignons me laissa seul au monde.
Seul, car j’avais volé huit sous dans le tiroir-caisse pour m’acheter des billes – et mon père en courroux s’était écrié – « Puisque tu as volé, tu seras privé de champignons ! » Ces végétaux mortels, c’était le sourd- muet qui les avait cueillis – et ce soir-là, il y avait onze cadavres à la maison.
Qui n’a pas vu onze cadavres à la fois ne peut pas se faire une idée du nombre de cadavres que cela fait.
Il y en avait partout.
Parlerai-je de mon chagrin? Disons plutôt la vérité. Je n’avais que douze ans, et l’on conviendra que c’était un malheur excessif pour mon âge. Oui, j’étais véritablement dépassé par cette catastrophe – et n’ayant pas assez d’expérience pour en apprécier l’horreur, je m’en sentais, pour ainsi dire, indigne.
On peut pleurer sa mère ou son père, ou son frère – mais comment voulez-vous pleurer onze personnes! On ne sait plus où donner de la peine. Je n’ose pas parler de l’embarras du choix – et c’est un peu pourtant cela qui se passait. Ma douleur sollicitée à droite, à gauche, avait des sujets de distraction trop nombreux.
[…]
Le jour de l’enterrement, derrière ces onze cercueils que je suivais, la tête basse et les yeux secs, je me demandais si le fait d’avoir été miraculeusement épargné ne me donnait pas l’air un peu d’avoir, assassiné tout ce monde, – cependant que, dans mon dos, l’on chuchotait :
« Savez-vous pourquoi le petit n’est pas mort? … Parce qu’il a volé !»
Oui, j’étais vivant parce que j’avais volé. De là à en conclure que les autres étaient morts parce qu’ils étaient honnêtes…
Et, ce soir-là, m’endormant seul dans la maison déserte, je me suis fait sur la justice et sur le vol une opinion peut-être un peu paradoxale, mais que quarante ans d’expérience n’ont pas modifiée. “
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3 — Choisissez 2 parmi les 4 conseils retenus pour les développer en s’inspirant de Guitry : soyez excessif(ve) et inventez votre morale.
Bon, pas de résultat avec le temps imparti…
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& puis, Leslie, qui chante magnifiquement, m’a donné ce disque (c’est elle à gauche)
Un de ces conseils :
Avoir sur soi 3 cadeaux à offrir à tout moment, 1 pour quelqu’un qui aime écrire, 1 pour quelqu’un qui aime manger, 1 pour quelqu’un qui n’aime rien
Iimage qui me fait penser au conseil de Sylviane (revu par David) :
Elles-Ils joueront à Marseille début décembre, venez !
Avec cet autre conseil de David : être au four & au moulin n’est pas une question de duplicité
(ni d’ubiquité…)
— & le 17 octobre, c’est une date mauvais souvenir historique, celle du 17 octobre 61
rdv le mercredi 16 et le samedi 19
Mardi 8 octobre, 18h30-20h30 (venez vous joindre à nous!!), nous travaillons à partir de 2 textes :
• des extraits de Annie Ernaux, la Place (Gallimard)
La place, c’est le lieu où l’on vit (a vécu), & l’endroit (mental) d’où on écrit…
1 – Décrivez la place de votre jeunesse (en pensant à l’écriture d’Annie Ernaux), faites le portrait d’une société et vous au milieu, comment vous vous débrouillez avec les différents éléments.
Signifiez le bonheur et l’aliénation, arrachez-vous du “piège individuel”.
• la maison
David :
Agnès :
Dominique :
Manée :
Raphaëlle :
• les habitudes de vie • les relations entre les membres de la famille • le langage
Raphaëlle :
Dominique :
David :
Agnès :
Manée :
• des extraits de André Markowicz, Partages (Inculte)
– Cherchez un ou des détails révélateurs, qui ont un sens “supplémentaires” dans votre histoire (histoire, langage, objet…)
– Un acquis joyeux conservé quoi qu’il arrive, qui permet de supporter tout le reste
David :
Dominique :
Agnès :
Raphaëlle :
Manée :
Dans Le Roman noir de l’Histoire, Didier Daeninckx retrace par la fiction documentée les grands mouvements du temps (de 1855 à 2030…), les utopies de la Commune, le fracas de la chute des empires, les refus d’obéir, les solidarités, la soif de justice, l’espoir toujours recommencé mais aussi les enfermements, les trahisons, les rêves foudroyés, les mots qui ne parviennent plus à dire ce qui est…
Ecoutez cette émission, avec Didier Daeninckx au micro de Laure Adler, c’est absolument passionnant !!
A un moment, vous l’entendrez, il parle de son enfance, des couvertures de Détective chez ses parents ou sa grand-mère, je ne sais plus, et puis aussi, de leur voisine morte au métro Charonne le 8 février 62, alors qu’il avait une dizaine d’années, de l’enterrement au Père-Lachaise (avec le mur des fédérés), avec 500 000 personnes dans les rues… Il dit qu’il a été happé par cette histoire.
Il parle aussi de son livre sur Missak Manouchian,
dont ces paroles :
“Pour sauver la poésie, il faut prendre partie et prendre les armes. Le moteur de sa vie (à Manouchian), c’est de sauver la poésie, le seul espace de liberté où les mots peuvent dire 10 000 choses à la fois alors que la 1ère victime des dictateurs c’est toujours la poésie, quelques chose qui ne peut pas être mis en ordre de marche ; c’est Garcia Lorca et ainsi de suite.”
malgré le mot-à-mot de certaines “illustrations”.., sinon, cette version dépouillée où le texte résonne :
& cet entretien réalisé par Nicolas Dutent et Guillaume Quashie-Vauclin avec Didier Daeninckx dans La Revue du Projet, n° 11, octobre-novembre 2011 :
Nicolas Dutent : Si on opère un retour rétrospectif sur votre œuvre, une question qui s’impose est de savoir de quelle manière vous avez décidé de permettre et de réussir la synthèse entre mémoire historique et démarche romanesque.
Didier Daeninckx : Au départ ce n’est pas une volonté théorique de choisir cette manière d’interroger l’histoire par le biais de la fiction. Cela tient vraiment à un parcours personnel. Dans une première période, le roman m’a permis d’interroger des moments de ma propre histoire, et d’élucider certaines interrogations en jetant des hypothèses. Mon premier roman, avant Meurtres pour mémoire (1984), évoquait la construction de la centrale de Fessenheim et traitait des enjeux liés au nucléaire dès les années 1970. Il interrogeait par exemple la manière dont une société est saisie d’une technique qui peut la conduire à sa destruction.
Je venais d’un milieu extrêmement confiant dans l’idée de progrès, qui était alors considéré comme quelque chose d’obligatoirement positif et libérateur et, d’un seul coup, cet espace était confronté à quelque chose qui disait le contraire, pointant l’incapacité d’aborder cette interrogation environnementale.
Juste derrière j’ai écrit Meurtres pour mémoire, qui questionnait la guerre d’Algérie, les répressions, le fossé qui s’était creusé entre des gens qui portaient un discours et une action indépendantistes et des forces progressistes qui les avaient lâchés. Je m’étais alors inscrit dès 1983 dans l’interrogation du silence d’une société sur les responsabilités de gens arrivés aux plus hautes instances du pouvoir. Tels Maurice Papon ou Bousquet en embuscade. Il y a dans mes livres d’une part une critique de l’état de la société mais aussi un regard parfois effaré sur mon propre camp, une forme de désespoir raisonné sur ses insuffisances et petites lâchetés.
Guillaume Quashie-Vauclin : Ce qui est justement frappant dans Missak, c’est cette sorte d’état d’esprit historien qui est le vôtre à certains égards, votre volonté de comprendre et de faire comprendre qui est Dragère. Sans amener le lecteur à juger de manière trop frontale. Cette démarche, pourtant ancrée dans le code génétique de la discipline historique, un certain nombre d’historiens s’en écartent paradoxalement aujourd’hui… Comment conciliez-vous donc l’exigence de la méthode historienne et son articulation avec les « droits imprescriptibles de l’imagination » (La Semaine Sainte, Aragon) ?
DD : Pour Missak, cet enjeu a été encore plus évident que dans mes autres romans. Par l’intermédiaire d’un personnage clairement identifié, ma recherche a été celle du vraisemblable. Constatant des « trous » énormes dans la biographie de Missak Manouchian, ma volonté a été de rechercher ses actes à partir d’éléments concrets datant par exemple de 1938/40 et en tirer des éléments romanesques vraisemblables. Confronté au pacte germano-soviétique et apatride, les Allemands ayant eu à l’époque une responsabilité majeure dans le génocide arménien, comment va-t-il se comporter ? Si nous n’avons pas de textes, nous savons comment il va agir, il le fera en s’enrôlant dans l’armée française dès 1939. Il est ainsi tout sauf dans une position attentiste ; il est dans une démarche de lutte contre le nazisme qui le pousse à se retrouver instructeur en Bretagne. Tout ce parcours est vérifiable. Si ce travail est à base historique, sans que je sois pour autant historien, j’emprunte effectivement ces techniques d’interrogation de la réalité. Mais l’historien, lui, ne s’autorisera jamais à constituer des scènes et à « placer » le personnage. Ce travail s’est accompagné par ailleurs de nombreuses découvertes d’archives, avec l’injonction correspondante de ne jamais excéder la réalité vérifiée du personnage. Sans pour autant se priver de l’invention romanesque : cette voie est donc extrêmement étroite. Aragon avait si bien montré dans le Cycle du Monde réel sa capacité à interroger à la fois son époque et sa relation à son père, préfet de police ; la filiation est donc là, en abîme, elle devient un enjeu essentiel à côté du travail de retranscription historique.
ND : Envisagez-vous donc la fiction comme un moyen, si ce n’est d’accéder à la vérité (entreprise fort risquée et incertaine), mais de la rétablir lorsque celle-ci pour des raisons parfois obscures a été bafouée, comme par exemple le 17 octobre 1961 ?
DD : C’est dire en effet une partie des éléments de la vérité qui ont été dédaignés, mis de côté, rabaissés. Mais au moment de la production du livre, cette intention ne préexiste pas. C’est un constat a posteriori, possible rétrospectivement. Le plus essentiel demeure pour moi le point de vue adopté pour faire en sorte d’être au plus près de la réalité. Cette question du point de vue est résolue de manière différente dans Meurtres pour mémoire où j’entreprends un travail sur trois époques par un jeu de miroir, tandis que dans Missak, c’est choisir le moment où on peut débusquer les non-dits quand les choses ne sont pas encore dites vers 1955/56 (Budapest, rapport de Khrouchtchev). On navigue entre le mensonge absolu et le début des aveux. C’est là qu’Aragon, personnage non central mais important de ce roman, écrit son magnifique poème « l’Affiche rouge » qui pose le problème de la vérité et montre les contradictions et les tensions du moment, de ce qu’on nous a rabâché, de ce qu’on a pris alors pour vérité […].Ce qui me passionne dans l’écriture c’est ce passé récent qui a encore une charge sur le quotidien. Meurtres pour mémoire n’est ainsi pas écrit n’importe quand : il prend forme en 1983 au moment de la marche des Beurs, quand un mouvement profond se développe dans notre pays où une partie de la population discriminée se rend compte qu’elle est discriminée aussi parce qu’on l’a privé non pas seulement de territoires, mais de territoires imaginaires notamment. Cette irruption-là, comme le 17 octobre 1961, est centrale car les acteurs de cette nuit-là ne sont pas à considérer en premier lieu comme des victimes – certains l’ont été et ce, horriblement – mais j’y vois avant tout une exigence de dignité et de citoyenneté dont le cœur de Paris est le théâtre (les manifestants devaient confluer place de l’Étoile) et qui s’exprime dans le défi suivant : « on vous regarde en face comme votre égal et ce territoire, nous avons le droit de le fouler des pieds ». Cette irruption de dignité est essentielle et traverse le 17 octobre 1961. C’est un défi historique majeur, tellurique, avec un peuple colonisé qui défie un empire en son sein, au cœur de sa capitale. Le travail de mémoire autour du 17 octobre 1961 est décisif car il met en lumière le dépassement en acte du statut de victime ou de colonisé et valorise une pleine phase avec la citoyenneté et l’histoire.
Quand je travaille, j’utilise mes intuitions au service de hasards, mais de « hasards objectifs » comme le dit l’ami contradictoire d’Aragon (André Breton). Dans ce que j’ai envie d’écrire, il y a des choses qui ont été disposées dans l’histoire contemporaine qui me permettent de les aborder et de les mettre en perspective aujourd’hui.
ND : Votre roman Missak, tout en donnant des clés de lecture et de compréhension nouvelles et précieuses pour ce qui est du parcours du poète arménien M. Manouchian, opère un retour attendu sur la polémique liée à l’Affiche rouge. Avez-vous eu l’intention, consciente ou inconsciente, de faire découvrir enfin à un plus grand nombre le destin pour le moins exceptionnel des vingt-trois membres des FTP-MOI de la région parisienne ?
DD : J’ai toujours été fasciné par le personnage de Missak Manouchian, par tout ce qu’il peut dire ; j’avais des éléments de lecture et de rencontres mais j’avais le sentiment que sa statue lui faisait de l’ombre. Comme c’est le cas pour certains héros. Le personnage était trop insuffisamment exprimé, avec des manquements énormes. Il y avait aussi les promesses non tenues, comme sa dernière lettre qui fait figure d’icône littéraire et donne naissance au poème d’Aragon et à la chanson de Ferré. Dans cette lettre, des choses sont demandées mais ne sont toujours pas tenues. Il demande à ses camarades d’éditer par exemple ses poèmes. C’était en février 1944 ; nous sommes en octobre 2011. Qu’on me montre une seule traduction française, ne serait-ce que d’une vingtaine de ses poèmes ! Le point de départ était donc celui-là : restituer une partie de sa parole et de son itinéraire qui n’étaient pas apparents. On s’interroge ainsi peu ou pas sur son parcours politique. Comme s’il était né avec la carte du PC arménien… J’ai voulu traduire l’histoire d’une prise de conscience qui tient dans la rencontre avec la langue française, ce qui n’est pas banal. Il y avait aussi un flou à résoudre sur la présence et l’action près de lui du militant trotskiste de la bande, Manoukian. Il m’a fallu voir comment les pièces qui semblaient appartenir à un autre puzzle pouvaient prendre place dans le « puzzle Missak Manouchian ».
Par ailleurs, en décidant que le point de vue adopté serait l’inauguration en mars 1955 de la rue du Groupe-Manouchian à Paris (XXe), j’ai pu aussi bien donner un rôle déterminant au journal L’Humanité (à partir de recherches réalisées à Bobigny, aux archives) ou à Willy Ronis que m’inspirer pour une bonne part de Jean-Pierre Chabrol pour fabriquer et asseoir mes personnages dans le roman.
Dans ce paysage de nuages, on parvient progressivement à lever ces mystères, au milieu de certaines impossibilités toutefois.
Ma méthodologie a ensuite été facilitée par certains épisodes romanesques comme la découverte d’archives personnelles le concernant. Pour la petite histoire, alors que je commençais le travail de lecture, j’ai appris qu’une exposition sur la résistance arménienne se tenait au musée Jean-Moulin au dessus de la tour Montparnasse. Il y a de nombreux documents de la préfecture de police, de filatures, de comptes rendus et diagrammes établis à l’époque et certaines choses émouvantes comme la Bible sur laquelle Jean Epstein écrivit le nom de son fils en prenant ce faisant un risque incroyable. Et il y avait un tableau datant de 1925/27, une huile de très bonne facture représentant M. Manouchian, nu et sportif. Je relève le prénom du peintre et me renseigne naturellement sur sa provenance. Après des recherches, je retrouve la personne ayant prêté le tableau et je tombe sur Katia Guirogossian qui se trouve être la nièce de M. Manouchian. Mélinée avait une sœur, Armène, qui est la grand-mère de Katia dont je suis devenu assez proche. Elle m’apprend alors qu’elle possède des sanguines, des études, des photos et plusieurs cartons de documents appartenant à Missak et Mélinée, ainsi qu’à Armène passée sous silence dans l’histoire du groupe Manouchian… Elle me confie qu’elle n’a jamais osé lire dans le détail tout cela, le poids de l’Histoire étant trop massif. Croyant être engloutie par ce passé, elle me demande si je veux bien lire ce qui se trouve dans ces témoignages divers. C’est essentiellement là-dedans que j’ai trouvé et puisé une grande partie de ce qui se trouve dans le livre. Comme le fait de tomber sur l’original de la dernière lettre de Manouchian glissé dans la lettre qui porte le nom de Mélinée, et dont on s’aperçoit quand on la retourne qu’il est inscrit : « Missak Manouchian, section allemande de la prison française de Frênes. » Il domine le moindre mot qu’il trace : tout est net, calibré. On sait qu’il s’adresse à l’Histoire.
Quand je repose cette lettre, il y a la sœur de cette lettre, avec une enveloppe et un papier identiques. L’avant-dernière qu’il écrivait à Armène, la sœur de Mélinée et dans laquelle il y a le début de « l’énigme Manoukian » et sa résolution : dans cette lettre – document inédit et authentique que personne n’a eu entre les mains hormis sa famille, document reproduit pour la première fois dans mon roman – il confie à Armène un devoir sacré, celui de prendre en charge et de défendre la mémoire de son ami Dav’tian dit Armenek Manoukian. Le fait que ce soit le seul de ses compagnons cité représente une importance capitale et un enjeu considérable.
GQV : Ce Dragère enquêteur, curieux et admiratif de la figure communiste peut-être exemplaire de M. Manouchian, n’est-ce pas finalement une certaine projection de l’objet et du contenu de votre travail ?
DD : Il y a de cela. Il y a en germe également cette interrogation : comment gérer les désillusions ? Considérons néanmoins qu’il s’agit non pas d’un travail de déconstruction mais d’« amplification » de la figure de Manouchian. Un personnage meurtri mais dont l’image n’est jamais abîmée. Il est en échec dans tout son univers mais il se fortifie sur des adhésions et des principes. Il y a ce double mouvement qui fait que la vérité sur Manouchian est bien plus enthousiasmante que ce qui avait été compris ou construit.
Cette complexité nous conforte dans l’idée que la vérité vraie est beaucoup plus dynamique que la vérité construite.
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(une affiche de François Burland)
J’ai repensé à Daeninckx ce midi ;
ça fait plusieurs fois que je vois vers midi un camion de détenus qui passe à toute blinde sur les voies (vides) du tram, avec leurs mains accrochées aux petites et hautes ouvertures grillagées, un bout de visage déformé (la “fenêtre” est très en hauteur près du plafond) et les gars qui gueulent.
Comme je devais regarder ce convoi pénitentiaire avec un drôle d’air, une femme m’a parlé :
— A chaque fois, c’est à l’heure de la sortie des écoles et mes enfants voient ça, c’est terrible…
— Ils peuvent quand même leur faire des signes de bonjours!
Est-ce que ce passage “spécial” de camion pénitentiaire en ville avec les détenus à peine visibles et leurs cris peu compréhensibles, sera pour un quelconque enfant une scène “marquante” pour son avenir?
Un entretien de Serge Hulpusch avec Federico Rossin, dans l’Echo, à propos du Journal d’un maître d’école , qu’on verra le 5 octobre à Tulle :
Comment Vittorio De Seta en vient à tourner en 1971, Diario di un maestro ? Quel est son cheminement, le contexte politique, culturel, cinématographique ?
Il a lu un livre qu’un ami scénariste lui a proposé, un journal d’un vrai maître d’école de la banlieue de Rome, publié par une maison d’édition qui s’intéressait aux pédagogies nouvelles et notamment traduit les écrits de Freinet. Ce livre racontait au fil des jours pendant une année scolaire la découverte de ce monde de la banlieue, fait de bidonvilles, de baraques, un quartier laissé à lui-même par l’Etat. L’école était une sorte de frontière à franchir. Les enfants n’allaient même plus à l’école.
L’instituteur a décidé, au lieu de faire une classe-poubelle, d’aller à la rencontre de ces enfants, de les impliquer dans une transmission de savoirs qui n’était plus verticale, classique mais horizontale. C’est-à-dire de faire émerger des enfants le savoir à partir de leurs connaissances de vie, de leur art de vivre, de leur appréhension de l’espace. Donc de détourner complètement le dispositif de l’institution scolaire tout en restant à l’intérieur.
Cette façon de faire autrement comme Montessori, Freinet et plein d’autres pédagogues a passionné De Seta. Au début il voulait juste adapter le livre pour en faire un téléfilm classique.
Le basculement s’opère comment aussi pour le cinéaste ?
C’est le moment d’or de la télé italienne. Rosselini, Bresson, Straub étaient produits par la Rai. Il y avait la possibilité de réaliser des films à la fabrication plus expérimentale.
Vittorio De Seta s’est rendu compte que sa première adaptation ne fonctionnait pas parce que si on veut réinventer le dispositif pédagogique de l’enseignement, il faut aussi réinventer le cinéma. A partir de là, il a trouvé un acteur professionnel, le seul du film qui joue le rôle du maître. Il a travaillé pendant un an avec un assistant pédagogique. Et au fur et à mesure du tournage dans une vraie classe, avec de vrais enfants.
Pour « ne pas faire un film », et « faire une école », De Seta renonce au principe du scénario. Il s’entoure de techniciens virtuoses et avec un conseiller pédagogique qui assiste les enfants sur le tournage quotidiennement, il écrit chaque soir un schéma de tournage transmis à l’équipe le matin même. Les scènes sont improvisées par les adolescents et le maestro sur la trame d’une fiction écrite au jour le jour. Le récit venait aussi des enfants. Par exemple, ils amenaient des lézards et ensuite travaillaient sur le sujet de la violence sur les animaux, la science. A partir de là l’écriture des textes, leur correction, la grammaire, la lecture sans rien imposer pour que les choses arrivent du savoir des enfants.
Dans le cadre de ce travail collectif, le réalisateur se trouve volontairement dessaisi de la direction des opérations, à l’image du maestro qui renonce à sa position de maîtrise pour se voir inversement enseigné par le savoir et l’imprévisibilité des enfants-adolescents. La notion d’auteur est mise à mal ; la capacité de réagir collectivement à l’événement devient la condition de la vérité du film.
Une sorte de work in progress?
C’est un film en train de se faire sous nos yeux. Il est tourné chronologiquement. La façon de filmer change. C’est la question pédagogique du tâtonnement. On cherche au fur et à mesure, on improvise et on fait selon ce que l’on a. La question des manuels scolaires est abandonnée comme le scénario. Les enfants ne savaient pas quand ils étaient filmés. Il n’y avait pas de clap.
L’équipe avait inventé une façon de synchroniser autrement. Ils étaient payés car le réalisateur considérait que c’était un travail. Pendant 4 mois et demi, ils ont travaillé de 10h à 13h et l’après-midi, il revenait dans la même classe avec un instituteur qui poursuivait les travaux entamés le matin. Il y avait une vraie circulation extraordinaire entre la vie et le film.
C’est pour cela que vous qualifiez le film d’«essai pluridimensionnel».
Exactement. L’essai, c’est une tentative de créer quelque chose au delà de la position d’en-haut. C’est une leçon politique, d’éthique cinématographique et une invention formelle incroyable. Ce film mérite d’être découvert. Il a été vu par 20 millions de personnes quand il est sorti à la télévision et vendu 40 pays sauf la France. C’est le moment de le voir aujourd’hui.
Ce film pour la télévision italienne, fait écho à une série française des années 70 méconnue La maison des bois de Maurice Pialat, où le cinéaste joue le rôle d’un instituteur pendant la Première guerre mondiale.
C’est les hasards de la vie. Cette série a été doublé en italien et a été vu en Italie à la même époque. Là avec cette série classique, il ne s’agit pas de raconter une école différente. Il s’agit de parler d’un homme extraordinaire en train de réaliser des choses. La façon de filmer est magistrale mais on reste dans le cinéma de fiction.
Sur la forme, on pense également au cinéaste Bruno Dumont qui tourne souvent avec des acteurs non-professionnels.
C’est un vieil héritage de Bresson. De Seta fait autre chose. C’est un jeu qui ne peut avoir lieu qu’avec les enfants. Dans le film, il y a un enfant un peu plus âgé, qui a 14 ans. Lui, il n’y croit pas et il va se détacher du projet. C’est essentiel car l’école a à faire avec les enfants. l’école enserre souvent les enfants dans des projets d’adultes comme en France avec cette idée de planifier la vie de quelqu’un à partir de l’âge de 10 ans.
Dans le film, on voit que la vie est plus complexe, nuancée, moins dirigée. Il y a la prise en compte de la question matérielle, de la vie de ces gens. C’est une enquête anthropologique, ethnographique sur le champ social mené en même temps.
Le film nous dit qu’on pourrait imaginer une autre forme d’école qui prendrait les enfants tels qu’ils sont et non tels qu’on voudrait les voir adhérer à un programme, un schéma de pensée?
Pour moi, «l’inactualité» de cette oeuvre me fait désespérer de la pauvreté de l’école d’aujourd’hui. On réécrit à chaque Gouvernement les programmes mais jamais la méthode. C’est cela qui est grave.
Le film montre que les choses sont simples si on a une volonté politique. La perspective n’est pas déscolarisante, du type « l’institution est corrompue, ce ne sera jamais un lieu d’émancipation. On va faire autrement, à la maison, dans le privée, en collectif. » Pas du tout, c’est du dedans qu’on peut réformer les choses. Le film donne de l’espoir sur le faire ensemble.
Quelle a été la réception du film en Italie et son impact dans un pays où émergeait de nombreuses expériences comme l’anti-psychiatrie?
Elle a été extraordinaire. Le film a réellement contribué à un débat collectif. Il y a eu tout un changement au sein de la société italienne dans différents domaines. Ce n’est pas un hasard si on redécouvre maintenant ces œuvres quand on a considéré ces 20 dernières années, l’école comme une espèce de jetée pour lancer les enfants dans le monde du travail. Cela a causé des dégâts énormes au niveau de la transmission des savoirs, de la dépolitisation. On en revient à la réinvention du quotidien que ces œuvres promettaient.
Il y a la question des égalités des intelligences et celle de l’inégalité des points de départ. Il faudrait considérer les élèves comme des singularités pas comme des moutons. C’est un point essentiel. Le film montre à quel point on doit résister et changer les choses. Il faudrait arrêter la dictature de la validation, des acquis. Les choses arrivent dans la vie. Il ne faut pas toujours évaluer, évaluer et sur quelles bases ! Il n’y a pas qu’un niveau, un modèle qui produit des petits robots bien cadrés, formatés, disciplinés.
Le film montre qu’on peut arriver à un savoir fondamental mais par d’autres moyens. Sa forme produit une nouvelle écriture pour un nouveau contenu, un autre possible.
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Cela me renvoie aussi au travail de Nicolas Frize, et de ce très beau nouveau livre : Les sources d’Elle s’écoule, que vous pouvez trouver là
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& pour finir sur la représentation, cette belle lettre de Pasolini à Maria Callas, vue sur fb:
Peu de monde aujourd’hui, mais une nouvelle (bien)venue, Jeanne !
• Un extrait de texte d’André Markowicz ; (Partages ed. Inculte)
Où il est question d’un lieu secret et fondateur, un lieu qui nous centre.
Quel est ce lieu pour vous ? Comment, pourquoi ?
Faites des phrases courtes, adressez-vous à vous-même.
Sylviane :
David :
As-tu l’idée d’un lieu secret et fondateur, un lieu qui te centre toi qui est si décentré, toi qui a traversé tant de lieux, ou plutôt tu as été traversé par tant de lieux.
Tu as choisi de revenir vivre sur les lieux de ton enfance, ce qui pourrait être sensé si le sens ne s’était pas perdu en route. C’est parfois au détour d’une pensée tortueuse ou d’un rêve tout aussi tortueux qu’un fragment de ce lieu ressurgi, odeur, lumière, sensation de re-déchiffrer quelque chose d’autre fois bien codifié, organisé, mais pas enraciné.
Dans cette vallée où tu es revenu, tu n’y comprends plus rien. Tu connais bien ce rocher sur la rivière, mais il ne te veut plus, tu n’as plus la capacité de jouer dessus, d’y inventer un monde, d’en faire ton île.
Tout est là pourtant, un peu plus enfoui, un peu plus secret, tu ne sais plus comment on n’y accède, ou plutôt ça te coûterait trop d’essayer.
Cette rivière c’est ton lieu mais les crues successives t’ont emporté en aval, du coup tu es là et plus là. Les insectes et les truites sont partis avec, libellules bleues, vertes et jaunes, parties.
Malgré tout c’est là que tu veux être, vivre, construire ta maison.
Jeanne :
• Un texte de Marc Graciano, dans la Revue 19 : Ce que vivre veut dire
& pour vous, ce que vivre veut dire, par double vers, comme le texte
plusieurs pages svp, vous crispez pas, laissez venir les images et les idées, même « futiles », même « 3 fois rien », même un peu « folles », etc…
évitez les lieus communs ou détournez-les.
Jeanne :
David :
Être en roue libre
Lécher sa sueur
Manger goulûment
Regarder ailleurs
Avoir peur
Reprendre un verre de vin
Aller aux champignons
Poser un lapin
Mourir ventre à terre
Voler au-dessus de ses moyens
Boire une tisane sans eau
Sucer un caillou
Aller à la pêche
Cacher la misère
Écrire une page de duplicité
Se fendre la gueule
Avoir un mal de chien
Défroquer un prêtre
Être en panne sèche
Avoir le feu au cul
Écouter quelqu’un vous parler
Comprendre autre chose
Casser les pieds
Sortir prendre le frais
S’arracher une dent
Se recoudre une braguette
Penser à un beau cul
Reprendre du céleri rémoulade
Couper un vieux chêne
Mentir à son chien
Sauter en parachute
Éplucher des mouettes
Se marier à Pâques
S’enfuir en Australie
Gratter des moules de bouchot
Casser du sucre sur son dos
Sauter à pieds joints en juillet
Manger un plat froid le dimanche
Passer son chemin aux micro-ondes
Suivre une fourmi en enfer
Sylviane :
& Agnès en guest star, qui a improvisé l’exercice dans sa bagnole un jour en allant au boulot..!
Merci à vous avec cette photo du jour…