atelier d’écriture du lundi – n°3
• Lundi midi, au Lieu/Lien, l’atelier d’écriture.
Manée m’avait prévenu la veille, alors qu’elle était en compagnie d’un pigeon voyageur, que les troupes seraient réduites…
Très réduite, puisque Agnès était seule!
La double question du jour à expérimenter :
est-il plus difficile d’écrire sur quelque chose qui nous rend heureux que sur ce qui nous blesse ?
est-il plus facile d’inventer en piochant des éléments dans notre vie personnelle ?
Avec 2 livres :
• C’est l’histoire d’un type de Pierre Tilman (L’évidence)
• Dans ma tête de Nadine Agostini (Dernier Télégramme) + 2 notes de lecture
Après avoir lu les documents, au boulot !
En utilisant les mêmes « stratagèmes » d’écriture
• énumération
• anaphore
• répétition qui vrille et se transforme
• dérapage contrôlé ou non de la structure ou/et des idées
• imagination ancrée dans la réalité
• références servant de trampoline aux idées
• ….
1 — Quand j’étais petit(e), je croyais que….
Mêler des (vos) souvenirs d’enfance et des (vos) observations d’adulte (sur votre enfance ou des (vos) enfants)
Dans l’idéal, une centaine de propositions… allez, au moins 50…
Voici le mail d’Agnès :
“Bon et bien voilà, aujourd’hui c’était la journée des contraintes et des imprévus. ça arrive.
Et du coup, j’étais seule à l’atelier.
Je ne vais pas me plaindre, ça veut que j’avais la chance d’être libre comme l’air.
Manée a dit qu’on se rattaperait au prochain atelier.
Elle m’avait prévenue qu’il n’y aurait peut être “pas grand monde”, alors j’avais préparé un breuvage réconfortant 😉
Et puis je n’étais pas vraiment seule, il y avait derrière les baies vitrées tes petits sentinelles de mots et de papier qui veillaient !
Pour le premier atelier, j’ai eu un peu de mal à écrire “devant” les autres, et aujoud’hui en fait, j’ai eu un peu de mal à écrire sans les autres.
Mais les sujets étaient vraiment supers, alors je me suis bien amusée.
Je n’ai pas “osé” faire d’enregistrement/lecture toute seule par contre.”
Quand j’étais petite je croyais :
Qu’il y avait des monstres cachés sous mon lit la nuit. Mais ça tout le monde le sait. Même les parents. Ils nous disent juste le contraire pour qu’on les laisse dormir tranquilles.
Que les martiens allaient bientôt arriver sur terre, mais qu’ils ne ressembleraient surement pas à E.T.
Que les têtards ne pouvaient pas devenir des grenouilles puisque, soyons sérieux, ils n’ont pas de patte.
Qu’on n’avait pas le droit de manger avec les doigts. Même si c’était tellement meilleur.
Que les hirondelles annonçaient le printemps.
Que je serais maîtresse d’école quand je serais grande. Ou archéologue, ou chanteuse, ou danseuse étoile, ou chercheuse, ou avocate, ou le commissaire Maigret. Mais en fille.
Que je serais grande quand je serais grande.
Que j’épouserais un prince charmant.
Qu’on pouvait être immortel. Parfois.
Que la mort de toute façon, ça n’arrivait qu’aux gens vieux. Très, très vieux.
Que l’océan pouvait m’emporter en me tirant par les chevilles. Alors j’enfonçais profond mes pieds dans le sable.
Que la foudre arrivait parfois à mobylette. Si, parfaitement ! Ca arrivait quand le beuglement du tonnerre coïncidait précisément avec celui d’un 103 SP traficoté qui passait dans la rue au même moment.
Que ce n’était pas possible de faire rentrer quatre chevaux sous un capot de voiture. Tout comme un éléphant dans un frigo (les traces de pas dans le beurre, c’est surement bien quelqu’un, mais pas lui !)
Que les serpents déposaient leur venin sur une pierre avant d’aller dans l’eau. Même que dans une exposition, j’en avais vu une, un jour, pierre à venin.
Que les filles étaient moins fortes que les garçons. Et que c’était comme ça. C’est tout !
Que les filles, ça n’avait pas le droit de jouer au football. Mais moi, je voulais y jouer quand même. C’est pour ça que j’ai insisté, jusqu’à ce que les garçons acceptent. Mais bien sur il y en avait qui n’étaient pas contents.
Qu’on pouvait changer de couleur, si on voulait, en grandissant.
Que les garçons pouvaient porter dans leur ventre des enfants. C’est juste que ça les arrangeaient que ce soit leur femme qui le fasse. Et qui reste à la maison.
Que les médecins pouvaient tout guérir. Jusqu’à ce que Pépé meurt.
Que mes parents ne vieilliraient jamais.
Que mes parents ne mouraient jamais.
Que les gens que j’aimais ne mouraient jamais.
Que les princes charmants ça existait.
Que les chats noirs portaient malheur, quand on les croisait la nuit. Enfin pas tous. Pas ceux des gentilles sorcières.
Que tout le monde était gentil.
Que le Président de la république était l’homme le plus intelligent.
Que les maîtresses d’école savaient tout. Vraiment tout.
Que les poules auraient des dents. Un jour.
Que les murs avaient des oreilles.
Que les chiens ne faisaient pas des chats. Quand même !
Qu’un jour, je pourrais tout savoir.
Que toute ma vie je continuerais à faire des cabanes dans les arbres. Où je cacherais des trésors. Et tous mes secrets. Parce que ça, c’est vraiment ce qu’il y a de mieux.
Qu’un jour il n’y aurait plus de pauvres. Au 21ème siècle par exemple. Même si c’était encore un peu loin.
Qu’il y avait toujours une justice.
Que, parfois, les adultes étaient stupides.
Que tous les livres étaient écrits par des gens très savants.
Que toute ma vie je continuerais à regarder la piste aux étoiles.
Qu’un jour, bientôt, on habiterait sur la lune.
Que les arcs en ciel étaient des passages secrets vers d’autres planètes.
Que la météo marine à France Inter, c’était dans une langue étrangère.
Qu’en avril, ne te découvre pas d’un fil ; en mai, fait ce qu’il te plait.
Qu’au défilé du premier mai, il y aurait toujours plein de gens. Et c’était chouette.
Que travailler c’était toujours drôlement bien.
Que travailler c’était peut-être un peu fatiguant. Surtout quand je voyais mon père partir à 6 heures le matin, rentrer à 19h le soir. Et qu’encore après il fallait qu’il aille s’occuper du jardin. Et que du coup, on ne le voyait que pendant le souper, et qu’il ne fallait pas trop parler. Parce qu’il était un peu fatigué, mon père.
Que dans les familles tout le monde s’entend toujours bien.
Que tout le monde a une famille.
Que dans les familles, on ne se bat pas.
Que le défilé du 14 juillet, c’était la fête des militaires.
Qu’un jour, il n’y aurait plus de militaires. Sauf qu’à Tulle, ça allait faire plein d’habitants en moins, parce qu’à Tulle il y en avait plein, des militaires. Surtout les dimanches.
Qu’un jour, il n’y aurait plus de guerre.
Que c’était bête alors, de continuer à construire des armes. Même si ça donnait du travail aux gens.
Que notre voisin savait tout. Parce qu’il était chef à la manu. Quand je posais à Maman des questions auxquelles elle ne savait pas répondre, elle me disait : « va demander à Monsieur P. ». C’était lui le voisin.
Que la voisine qui ne nous répondait pas quand on lui disait bonjour, elle était méchante. Ou bien peut-être triste.
Que ça peut arriver qu’on soit heureux toute la vie.
Que les garçons ça ne naissait pas dans les choux, ni les filles dans les roses. Que quand même, il ne fallait pas nous prendre pour des imbéciles !
Que quand on voulait des enfants, ils arrivaient dans le ventre de leur mère. C’est tout. Quant à savoir comment ils ressortaient de là ?….
Que les grands-mères étaient toujours habillées en noir, avec un petit chignon gris retenu par des épingles et des peignes en cornes juste derrière l’oreille.
Qu’elles coupaient avec de l’eau le vin des grands-pères, en cachette. Mais ça c’était pour qu’ils vivent plus longtemps.
Que le vin rouge était fait avec du raisin rouge. Et le vin blanc avec du raisin blanc.
Que la fin des haricots, ça devrait arriver un peu plus souvent. Parce que y’en avait vraiment marre d’écouetter et d’écosser plusieurs mois durant.
Que la soupe à la grimace, ça devait vraiment pas être bon.
Que Papa enlevait le pyjama du lapin (avant que Maman le mette dans la casserole)
Que mon arrière grand-mère était cuisinière dans un château. Un vrai ! Et c’était quand même extraordinaire.
Que la cousine de Mémé habitait en Afrique. Mais je ne savais pas pourquoi au juste tout le monde dans la famille disait sainte Afrique ?….
Que quand Mémé disait : « vaudrait mieux élever des cochons », c’était pour de vrai.
Que « rien ne sert de courir il faut partir à point », c’était bien joli, mais qu’en vrai …..
Que la jument verte, c’était comme les éléphants roses. Fallait pas pousser.
Qu’il fallait pas pousser Mémé dans les orties.
Que la Joconde, elle avait du en faire une bien bonne.
Que le bon roi Dagobert, il n’avait pas du être si terrible que ça.
Que le gars qui avait écrit, la terre est bleu comme une orange, il devait être daltonien.
Que la chanson des roses blanches du dimanche pour toi jolie Maman était la chanson la plus triste du monde.
Que Maman arrêterait un jour de me dire : « il fait froid dehors, couvre toi bien ».
Maman, s’il te plait, n’arrête jamais.
2 — Vous êtes assis(e) à la terrasse d’un café et vous laissez votre esprit vagabonder (sans le tenir en laisse) en regardant les gens autour de vous et passer…
Faites le « portrait » des possibles de 5 ( ?) personnes « observées » (1 par 1)
Quand vous sentez que ça devient plus difficile et que votre imagination patine, passez votre feuille à quelqu’un d’autre qui vous la repassera après avoir écrit quelques lignes qui vous serviront d’appui pour continuer.
“A la table à côté de moi est assise une femme fière au regard triste devant une tasse de thé vide. A son cou un foulard imprimé d’oiseaux multicolores, les ailes ouvertes, au milieu de chaînes dorées. Les oiseaux ne peuvent pas s’envoler. Leurs pattes ont du se prendre dans les chaînes. Ils restent là, prisonniers. Cà doit être cela qui rend la femme si triste.
En face d’elle, lui tournant le dos, un vieil homme en chemise blanche et costume noir couleur corbeau lit un journal très sérieux. Les gros titres annoncent des guerres, des révolutions, des élections traficotées, de l’argent qui part en fumée… . Pas de photo ni de couleur, juste des lettres noires sur des pages blanches. Est-ce que l’homme, s’il avait porté une chemise à fleurs colorées, aurait eu des lectures moins sombres ?
Deux ados arrivent sur le trottoir sur sa droite. Ils parlent fort et ponctuent leurs échanges de rires joyeux. L’un est petit et frêle, l’autre grand et massif. Ils semblent si différents. Mais ces deux là partagent de ces amitiés indélébiles qui transpirent dans chacun des regards qu’ils échangent. Ils s’en sont déjà fabriqués tant, des souvenirs. Pourtant parfois, la vie s’arrête sans crier gare. Plus de fabrique à souvenir. Ne reste que la mémoire.
Sur la place ombragée qui borde la terrasse du café, deux enfants jouent. Ils caracolent, se bousculent, slaloment entre les arbres, s’accroupissent un instant pour ramasser entre les pavés de mystérieuses découvertes, rient aux éclats, se murmurent de divins secrets à l’oreille. Bientôt ils s’assoient à même le sol, dos calés à un tulipier, jambes repliées, bras serrés autours des genoux, les yeux levés vers le ciel, la bouche ouverte. Qui d’autre qu’eux peut voir ce qu’ils observent ? Surement la naissance de quelque nouveau rêve fou.
De l’autre côté de la rue, sur un banc couleur de poussière, un jeune homme aux joues creuses et mal rasées, et au regard las. A ses pieds un grand cabas qui déborde. Que transporte un jeune homme aux joues creuses et mal rasées et au regard si las dans un si grand cabas ? Des illusions, des rêves, des guerres, des souvenirs ? Ou des oiseaux multicolores retenus par les pattes à une chaine en or qui les empêche de partir ?”
3 — une famille recomposée
Décrivez les membres de votre famille en trouvant une anecdote et des détails et actions qusortent de l’ordinaire (ou pas), en quelques lignes pour chaque personnage.
Ecrire sur une feuille une 1ère description d’un personnage de votre famille
Passer la feuille à quelqu’un d’autre qui complète l’énumération familiale avec la description d’un membre de sa famille à lui (ça peut-être le « même » – grand-père, frère, etc) en essayant de respecter le style et la structure du récit de la personne précédente, passer la feuille à quelqu’un d’autres, etc
Bon, nous reprendrons cette affaire la semaine prochaine, “en vrai”, et en + grand nombre, j’espère !