nous avons tant de choses à nous dire
Je venais d’accrocher ça, une enveloppe en papier cristal sur laquelle j’avais imprimé pour essayer une composition d’Elisabeth à L’Encre Rouge, je lisais/regardais le gros livre rétrospectif de Sophie Calle…
Quand D. et A. sont passés main dans la main devant le Lieu/Lien rue Jean Jaurès, ont regardé la vitrine; on s’est souri, ils sont partis, quelques pas, puis revenus ; ils sont rentrés, se sont assis à la table où j’étais, car A. est enceinte et fatiguée.
& on a commencé à parler.
J’ai présenté le Lieu/Lien, pourquoi j’étais là, avec qui je travaillais, ce qui m’intéressais d’y faire, entre autre chercher des formes pour rendre visible des paroles peu présentes dans l’espace public…
A. a parlé des gilets jaunes, être ensemble pour (se) parler, faire que le monde soit meilleur. Elle dit “nous, le peuple…”
D. voulait écrire mais n’osait pas, ne savait comment.
Que ça puisse l’aider à se débarrasser d’un gros poids avant que le bébé n’arrive au printemps tout innocent, et aider d’autres qui traversent les même problèmes.
Sa vie trop difficile jusqu’à peu de temps, jusqu’à rencontrer A.; camé, alcoolique, “jusqu’à se chier dessus, pardon de vous dire ça”, mari battu “quand vous êtes forcé à coucher sous le lit”, enfant abusé par son frère : “je le revois toujours, cette image, ma mère est arrivé, a retiré le manche à balai, et a dit “bon, en n’en parle plus”, plus pouvoir s’assoir pendant une semaine, “et arrête de te plaindre”. “Elle a toujours eu le cœur sec”. Son frère qui ne l’a jamais laissé prendre ses enfants dans les bras, “comme si j’allais leur faire mal et me venger!”
Il a même arrêté de fumer du jour au lendemain “pour le bébé”, et il ne veut pas que sa femme qu’il porte aux nues ait honte de lui. Ils se connaissaient depuis longtemps, elle lui plait depuis toujours mais elle le “paralysait” ; et elle n’avait rien vu.
Ils sont beau dans leur humanité, leur simplicité à dire, en confiance, leur amour ; ils m’émeuvent fort.
Nous prenons rdv pour ma prochaine session à Tulle.
Oui, je peux l’aider à écrire, l’aider à ordonner son histoire, l’aider à prendre le recul de l’écriture, “mais ce projet, ça pourra peut-être remuer des trucs douloureux, hein..” Il sait, mais sa femme est là pour l’aider, leur amour lui “rend la vie magnifique”, et c’est important de tout raconter, “pour l’enfant, un jour”, jusqu’à ce bonheur possible.
Si notre local peut provoquer des rencontres comme celle-ci, et bien tant mieux.
En que ce récit voit le jour, parle à d’autres et pour d’autres.
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Les sacs que vous voyez ici et plus haut proviennent d’un petit atelier jeudi dernier avec des apprenants français, avec les resto du cœur.